Cahier de Lucien Dodin père, page 21

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trois commissions - les chemins ruraux - l'accomplissement de ses devoirs - Je n'ai pas exagéré - l'heure de la messe - ressources médicales et chirurgicales

Ensemble des fac-similé

Lettre du 13 juin 1889 (brouillon)

(cette lettre manuscrite comporte de nombreuses ratures. Je rapporte ici ce que j'en comprends)

Le conseiller municipal soussigné prie monsieur le maire de Challans de soumettre aux membres du conseil municipal lui même en séance ordinaire de mai la proposition la suivante.

Qu'il plaise au conseil municipal de Challans:

A de fractionner en trois commissions possédant des attributions diverses

3° Les finances 7 membres

2° Entretien de la ville 7 membres

Bâtiments communaux
Foires et marchés

1° Voirie urbaine 8 membres

Chemins ruraux
Salubrité et hygiène publique

Dans l'état actuel il nous est bien difficile, voir impossible de remplir convenablement notre mandat. Chacun de nous ne peut en effet se rendre compte de tous les besoins de la commune, la meilleures de toutes les dépenses, comprendre l'utilité de certains travaux.

En acceptant cette division du travail chaque (??) aucune dépense ne pourra être engagée sans avoir été préalablement étudiée et concertée avec tous les éléments d'information et du temps nécessaire.

B. de mettre à disposition de la deuxième commission une somme de ... 500F

Cette somme sera intégralement dépensée pour l'amélioration des foires et des marchés, sous la forme de primes ou toute autre action proposée par le conseil municipal.

XXXX

C. désigner, après un rapport de la première commission, les chemins ruraux dont le besoin d'entretien sera urgent et la somme qui devra être attribuée à chacun d'eux.

D. l'insertion au procès verbal de la séance de juin des propositions précédentes dans la forme ou elles vont être présentées.

Challans le 13 juin 1889

(signature illisible)

XXXX malgré la situation privilégiée occupée par notre ville, la valeur et l'importance de nos foires et marchés semblent minimes il faut lutter pour développer le commerce de notre localité.

Quelles que soient les divergences d'opinions à ce sujet, nul, ne peut nier qu'il soit temps de faire quelque chose

XX nous pouvons pour l'instant prévoir baisse dans le prix de la ferme de nos places et de notre champ de foire.

Le Vendéen, dimanche 29 août 1889

(lettre manuscrite. Cette lettre m'étonne car elle semble critiquer L. Dodin, si elle n'est pas de lui, comment expliquer qu'elle soit en notre possession?)

Le Vendéen dimanche 29 août 1889

Nous recevons la lettre suivante:

Challans le 20 Août 1889

Monsieur le directeur,

Je viens de lire sur votre journal un (???) au sujet du tramway de Challans à Fromentine mais non signé: "un voyageur... etc et peu bienveillant dans tout ensemble pour les habitants de la Grand'Rue de Challans.

On va même jusqu'à nier encore que les inconvénients dont ils souffrent ne sont qu'une juste expiation de leur étourderie primitive.

Permettez à un (???) de renseigner votre voyageur et de mettre les choses au point.

Si les habitants de la Grand'Rue gémissent d'avoir le tramway à un mètre de leur maison, quelques-uns d'entre eux, il est vrai, en sont un peu responsables, mais ils seraient bien dignes d'indulgence.

Songez donc: la pétition qu'ils ont signée et qui a déterminé le tracé de la ligne leur était proposée au nom d'un homme dont l'étoile apparaissait radieuse à l'horizon et semblait devoir parcourir sans obstacle une longue et brillante parabole dans le champ infini de l'espace. Après avoir frappé plusieurs fois à la porte du conseil municipal, il était parvenu à y entrer... il allait être maire de Challans... puis il deviendrait conseiller général (???)... député de la circonscription, enfin ministre... etc. Pourquoi pas?

(???), Mossieur Daudinn, seraient (???) au tant qu'on sait ni homme bé capable fier être di ambitionne (patois local???)

Et éblouis par les rayons de l'astre naissant, les amis politiques de Mr Dodin signèrent les yeux fermés, leur condamnation.

Votre correspondant prétends les avoir entendus crier comme des blaireaux; mais je n'ai pas saisi dans leurs livres que le visse et silencieux avec qu'ils ont agi comme des ... naïfs

Quelque responsables qu'ils puissent être, de leur propre malheur, on ne peut cependant pas les plaindre d'avoir à trembler pour la vie de leurs enfants, journellement en péril, à tout (???) à leur porte

Faisant taire leur amour propre, ils sont revenus sur leur erreur et ont signé une autre pétition réclamant le déplacement de la ligne, laquelle pétition leur était présentée par un conseiller catholique, vrai "ami" du peuple.

Vous vous imaginez peut-être que Mr Dodin et les siens ont cherché à réparer leur bévue? Allons donc! C'eut été trop vulgaire. Ils s'empressèrent de faire une seconde sottise pour réparer la première.

Jugez plutôt.

La susdite pétition était présentée il y a quelques semaines, au conseil municipal, qui, à l'unanimité des voix souhaite le déplacement du Tramway.

Mais de quel côté de la ville fera-t-on passer la nouvelle ligne?

Nous verrons au génie inventif de monsieur le maire une route étroite plantée d'arbres et que par condescendance pour l'auteur on veut bien appeler "boulevard".

Partant de la gare, elle prends la direction de la route de Beauvais, du côté nord de la ville.

Nos conseillers catholiques trouvèrent tout d'une file, pour gagner du temps et réduire les dépenses, de demander que la ligne passât par ces boulevards, qui devinrent ainsi d'utilité publique.

Mr le maire eut du leur être reconnaissant de dorer ainsi la pilule amère qu'il nous a fait avaler.

Fi donc, était-il toujours à la remorque des cléricaux...

C'est trop économique ce que vous proposez-là, ça sent le réactionnaire... nous taillerons et larges et beaux boulevards, du confinement de la ville, à travers prairie, jardins et enclos, sur une longueur de six à sept cent mètres et c'est par là que passera le tramway.Ça coûtera un peu plus cher, mais qu'importe, l'ouvrier et le paysan payeront la note... ce sera plus digne, puis on écornera pas la propriété de notre ami Batuaud.

Et c'est cette monstruosité qui a été votée au conseil municipal de Challans par Mr Dodin et sa majorité.

Enfin, ce qui vous étonnera davantage, c'est que pour cette municipalité nous trouverons à l'age d'or de la cité challandaise. Votre voyage ne me parait pas d'un (???) lui. cependant Mr Riou, candidat au conseil général n'a pu découvrir que deux choses qui manquaient à notre bonheur: un étalon pur sang et un canal qui fera de Challans un port de mer et encore a-t-il promis l'un et l'autre. Conclusion: veuillez donc dire à votre honorable correspondant de ménager sa monture s'il veut qu'elle lui dure jusqu'au temps fortunés ou il pourra voyager sur la route de Challans à Beauvois mollement bercé dans un wagon bien capitonné, rêvant aux incalculables bienfaits de la municipalité challandaise.

Séance de l'assemblée Nationale du 25 décembre 1888

(4 pages, sans doute du Journal Officiel. Sauf erreur, M. de Baudry d'Asson est l'ancien maire de Challans. Il ne fait guère de doute que l'insertion de ces pages dans le cahier de Lucien Dodin père est dû à la question sur l'horaire des élections posée dans le deuxième point ci-dessous)

jourd'hui au moment de l'ouverture de la séance, je dois, conformément au règlement, consulter la Chambre sur la déclaration d'urgence de cette proposition de loi. En effet, la délibération ne pourrait pas s'ouvrir si la déclaration d'urgence ne couvrait pas la distribution tardive du rapport.

(La Chambre, consultée, déclare l'urgence.)

M. le président. Je consulte la Chambre sur le passage à l'article unique.

(La Chambre, consultée, décide qu'elle passe à la discussion de l'article unique.)

« Article unique. - L'association pour l'enseignement des sciences anthropologiques est reconnue d'utilité publique. »

(L'article unique est mis aux voix et adopté.)

ADOPTION DE LA PROPOSITION DE LOI DE M. MÉRILLON RELATIVE A L'ORGANISATION JUDICIAIRE

M. le président. L'ordre du jour appelle la 1re délibération sur la proposition de loi de M. Mérillon ayant pour objet l'extension aux tribunaux de commerce et aux conseils de préfecture de l'article 10 de la loi du 30 août 1883 sur l'organisation judiciaire.

Quelqu'un demande-t-il la parole dans la discussion générale ?...

Je consulte la Chambre sur le passage à l'article unique

(La Chambre, consultée, décide qu'elle passe à la discussion de l'article unique.)

« Article unique. - Dans toutes les juridictions, tout magistrat, juge ou juré, appelé à statuer ne pourra, à peine de nullité, siéger dans les affaires ou l'avocat, avoué ou mandataire occupant pour l'une des parties intéressées, sera son parent ou allié jusqu'au troisième degré inclusivement.

« La même interdiction sera applicable au ministère public. »

(L'article unique, mis aux voix, est adopté. - La Chambre décide ensuite qu'elle passera à une deuxième délibération.)

QUESTION ADRESSÉE A M. LE MINISTRE DE

L'INTÉRIEUR

M. le président. La parole est à M. de Baudry d'Asson pour adresser une question à M. le président du conseil, ministre de l'intérieur, qui l'accepte.

M. de Baudry-d'Asson. Messieurs, à l'approche des élections générales (Exclamations à gauche), tout ce qui touche à la consultation du suffrage universel prend une importance capitale. C'est cette considération qui me détermine à venir adresser à M. le président du conseil une question sur les élections municipales et notamment sur celles qui viennent d'avoir lieu dernièrement en Vendée et dans le département des Côtes-du-Nord. Très bien! très bien ! à droite.)

Je suis convaincu, messieurs, que tous les vrais amis de la liberté (Exclamations ironiques à gauche) apprécieront l'opportunité de ma démarche. (Oui ! oui ! à le droite.)

M. le comte de Lanjuinais, s'adressants à la gauche. Le mot de liberté vous fait rire ?

M. Lafont (Seine). C'est bien à vous à fe parler de la liberté! Sous l'empire, on la m respectait d'une singulière façon !

M. le comto de Lanjuinais. C'est nous In qui sommes les seuls défenseurs de la liberté! (Nouvelles rumeurs à gauche.)

M. de Lamarzolle. C'est absolument vrai!

M. le président. Messieurs, veuillez laisser parler votre orateur! 1. ds Baudry d'Asson. ... et que tous ici seront d'accord pour s'associer à la question que j'adresse au Gouvernement. (Applaudissements à droite.)

M. Jaurès. Nous nous associerons à la réponse!

M. de Baudry d'Asson. Vous la connaissez donc d'avance, mon cher collègue ? - Messieurs, jusqu'ici il était de tradition administrative, en Vendée comme dans bien d'autres départements, du reste, de fixer l'ouverture des scrutins dans des conditions telles que tous les électeurs eussent la facilité d'exprimer leur suffrage en toute liberté. Dans ce but, M. le préfet arrêtait que le scrutin serait ouvert à partir de sept heures du matin. Voici les sages raisons qui avaient déterminé cette mesure.

Dans notre pays, principalement, les agglomérations de population sont fort distantes les unes des autres; la majeure partie des électeurs ont, de ce fait, plusieurs kilomètres à faire pour se rendre à la salle du scrutin. Ils sont obligés, pour ne pas laisser à l'abandon leurs demeures isolées dans la campagne, et trop souvent visitées par les vagabonds... (Bruit à gauche), de se partager en deux groupes qui, successivement, se rendent au chef-lieu pour accomplir leur devoir électoral.

Ces déplacements ont lieu le dimanche; la loi en a ainsi sagement disposé; ils n'imposent, ce jour-là, aucun dérangement extraordinaire aux habitants, par cette raison toute simple qu'en Vendée, le dimanche, tout le monde se rend à l'église pour assister à la messe. (C'est vrai! à droite. - Bruit à gauche.)

M. Bourgoois (Vendée). C'est une liberté que Béranger a proclamée!

M. de Baudry d'Asson. En vue de permettre à chacun l'accomplissement de ses devoirs, l'office paroissial est combiné de façon qu'une partie des fidèles puisse assister au service divin à six heures du matin, repartir chez eux et remplacer ceux qui se rendent à l'église pour la grand'messe.

L'administration, respectueuse de ces nécessités locales avait, comme je l'ai dit, déterminé une heure matinale pour l'ouverture du scrutin. Cette combinaison était basée sur la justice et le droit commun, mais elle permettait aux électeurs de la campagne d'exercer une influence prépondérante sur les résultats du scrutin.

Cela ne faisait pas l'affaire de la minorité républicaine de notre pays... (Ah! ah! à gauche.)

M. le comte de Lanjuinais. ... qui ne va pas à la messe.

M. Maynard de la Claye. Mais si, les républicains vont à la messe; ils ne seraient rien sans cela!

M. de Lamarzelle. Les candidats républicains vont à la messe.

M. Gaudin de Villaine. Les républicains ont un candidat clérical dans la Charente!

M. de Baudry d'Asson. ... elle comprit qu'il y avait un moyen pratique et sûr de déplacer la majorité et qu'il fallait, pour y parvenir, mettre une partie des électeurs de la campagne dans l'impossibilité de s'approcher des urnes. Il suffisait, pour opérer cet étranglement du suffrage universel, de retarder d'une heure ou deux l'ouverture du scrutin; ce n'était pas plus difficile que cela! (On rit.)

Le plan fut soumis à l'administration préfectorale et le tour réussit. De cette façon la majorité républicaine de Challans a pu faire entrer un candidat de son choix au conseil municipal de cette ville.

Une seconde élection eut lieu deux mois après. Cette fois les vainqueurs du scrutin précédent, convaincus que leurs adversaires ne se laisseraient plus surprendre par cette manœuvre, obtinrent un arrêté préfectoral ouvrant le scrutin à neuf heures.

Malgré cette condescendance de l'administration, le succès n'a pas répondu à leurs efforts; le candidat désagréable à la préfecture a été élu. (Très bien ! à droite.)

M. Richard (Drôme). Eh bien! de quoi vous plaignez-vous ?

M. de Baudry d'Asson. Vous allez voir tout à l'heure de quoi je me plains, mon cher collègue, si vous voulez bien attendre cinq minutes; cela ne sera pas trop long. (On rit.)

Le candidat désagréable à la préfecture a été, malgré toutes ces manœuvres, élu à la majorité relative de 9 voix et à une voix de majorité absolue.

M. Maynard de la Claye. Il a eu du mérite d'arriver malgré toutes les manœuvres de la préfecture.

M. de Baudry d'Asson. Messieurs, ne croyez pas que nos adversaires se soient inclinés devant la décision du suffrage universel : ils ont demandé et obtenu du conseil de préfecture l'annulation de cette élection.

M. Henri Marmonier. Sans doute parce que vos amis s'étaient eux-mêmes rendus coupables de manœuvres!

M. de Baudry d'Asson. On ne s'est pas contenté, à la préfecture de la Vendée, de cette voix de majorité qui, pourtant, a suffi, hélas ! à nous infliger dix-huit années de République. (Exclamations à gauche.)

Sur divers bancs. A l'ordre!

M. le président. Permettez! monsieur de Baudry d’Asson!

M. de Baudry d'Asson. Le mot « infliger » n'a rien de blessant.

M. le président. Monsieur de Baudry d'Asson, je ne peux pas vous permettre de vous exprimer de cette façon.

M. Henri Marmonier. Cela n'a pas échappé à l'improvisation. A l'ordre ! On ne peut pas laisser injurier le Gouvernement (Bruit à gauche.)

M. le président. Veuillez me laisser faire la police de la séance, messieurs.

Je prie M. de Baudry d'Asson de vouloir bien expliquer ses paroles.

M. Henri Marmonier. Il n'a pas à les expliquer, il n'a qu'à les retirer.

M. de Baudry d'Asson. Il m'est bien facile d'expliquer mes paroles, messieurs : je veux dire que la France subit un Gouvernement qui la conduit à sa ruine et à son abaissement. (Applaudissements à droite. - Exclamations à gauche et cris : A l'ordre !)

M. le président. Monsieur de Baudry d'Asson...

M. de Baudry d'Asson. ...que ce Gouvernement n'est certainement pas celui que la France désire. Voilà l'explication de mes paroles.

M. le président. Monsieur de Baudry d'Asson, au lieu d'expliquer vos paroles, vous les agravez en disant que le Gouvernement conduit la France à sa ruine....

M. de Baudry d'Asson. Parfaitement !

M. le président. Je vous rappelle à l'ordre. (Très bien ! très bien! à gauche. - Exclamations à droite.)

M. de La Rochette. C'est la République qu'il faudrait rappeler à l'ordre, cela vaudrait mieux. (Rires approbatifs à droite.)

M. de Baudry d'Asson. Messieurs, il v aurait eu un moyen de déjouer ces combinaisons savantes dont je viens de parler, a l'aide desquelles on a pu enlever le droit de suffrage aux 250 abstentionnistes de la campagne, qui tous appartiennent incontestablement à la majorité conservatrice: il eût suffi de modifier les heures des messes, de telle sorte qu'elles concordassent avec celles du scrutin; mais alors on aurait crié à l'ingérence du clergé dans la lutte électorale. (Très bien! très bien! à droite.)

La chose eût été des plus justes et des plus correctes, chacun devant apporter, dans la mesure de ses forces, son concours effectif au candidat qu'il honore de ses préférences. (Approbation à droite.)

Mais, malheureusement, nous sommes dans un temps où l'exercice du droit le plus légitime est taxé d'abus de pouvoir.

M. Gustave Rivet. Mais vous violez le Concordat, monsieur de Baudry d'Asson.

M. de Baudry d'Asson. C'est vous qui le violez tous les jours. Je ne crois pas avoir dépassé mon droit en tenant un pareil langage. (Non! non! à droite.)

Les dispositions vexatoires et oppressives que le Gouvernement manifeste tous les jours à cette tribune et dans ses actes, contre le clergé paroissial surtout, auraient trouvé dans cette mesure de légitime défense une sorte d'excuse et de justification.

M. Eugène Durand. Allons donc! La Chambre a encore voté avant-hier un crédit de 32,000 fr. pour les curés.

M. de Baudry d'Asson. Oui, aux deux cent soixante-dix victimes des suppressions d'indemnités ecclésiastiques seraient venues s'en ajouter d'autres. Je dis : indemnités parce que pour moi ce n'est pas un traitement que reçoit le clergé, c'est une indemnité qui lui est due... (Très bien! très bien! à droite), et lorsque vous venez souvent ici traiter les membres du clergé de fonctionnaires salariés par l'Etat, je dis hautement à cette tribune, que vous n'avez pas raison d'employer cette expression. Vous donnez au clergé, et aux termes mêmes du Concordat dont on parlait tout à l'heure, une indemnité et non un traitement. (Applaudissements à droite. — Bruit à gauche.)

M. Gustave Rivet. Lisez les débats de 1792; vous verrez ce qu'on disait alors des biens du clergé !

M. le président. Monsieur de Baudry d'Asson, je vous invite à rentrer dans la question.

M. de Baudry d'Asson. Ceci dit, messieurs, je demande au Gouvernement s'il entend livrer le corps électoral à l'arbitraire des préfets, ou s'il est décidé, pour l'avenir, à faire respecter l'esprit de la loi de 1884, qui tend expressément à favoriser la généralité des votes et à donner aux électeurs la plus grande liberté. (Très bien! très bien ! à droite.)

Laissera-t-il créer un précédent qui permettrait, dans les élections générales, de mutiler le suffrage universel, d'altérer la sincérité du scrutin, et de livrer la majorité à la merci de l'administration ? Laissera-t-il lettre-morte le vœu qu'a exprimé le conseil général de la Vendée dans sa session extraordinaire du 3 courant, et dont je vous demande la permission de vous donner connaissance? (Très bien! très bien ! à droite.)

« Le conseil général,

Considérant que la plus grande facilité doit être donnée à chaque électeur pour exprimer sa pensée en toute liberté au jour du scrutin,

Que, notamment, ledit scrutin doit être ouvert à une heure qui permette aux habitants réunis pour un motif ou pour un autre au chef-lieu de la commune, de voter avant de retourner dans leur domicile souvent éloigné;

Regrette qu'à Challans, à l'une des élections municipales dernières, le scrutin n'ait été ouvert qu'à neuf heures, rendant difficile l'exercice de leurs droits électoraux aux hommes venus au chef-lieu pour assister aux messes du matin;

Demande qu'à l'avenir ledit scrutin ne soit pas ouvert après sept heures, ainsi, du reste, que l'usage en avait été établi et avait subsisté jusqu'à ces derniers temps. » Signé : « DE BAUDRY-D'ASSON, 0. BOUX I DE CASSON, E. HALGAN. 6. ODIN, BOURGEOIS, THÉOPHILE DE TINGUY, DE LAVRIGNAIS, STANISLAS DE LA DÉBUTERIE. »

Messieurs, en terminant, je veux vous dire un mot de ce qui s'est passé dans les Côtes-du-Nord. C'est un de mes honorables collègues qui me donnait ce renseignement tout à l'heure avant que je monte à la tribune.

Dans la commune de Plougnenast (Côtes-du-Nord), il y a un grand nombre de marins. Le préfet a choisi le jour des régates pour ouvrir le scrutin. (Rires à gauche.)

M. Gustave Rivet, ironiquement. C'est d'un machiavélisme étonnant!

A droite. Il aurait pu choisir un autre jour!

M. de Baudry d'Asson. On lui demandait une modification quant à l'heure, car je n'incrimine pas M. le préfet d'avoir désigné le jour des régates pour l'élection, mais enfin il pouvait bien choisir une heure qui permit aux marins de voter... (Très bien! à droite.)

M. Maurice-Faure. Le devoir passe avant le plaisir !

M. de Baudry d'Asson. On peut mener les deux à la fois ! (Très bien ! à droite.)

Eh bien, c'est ce qui n'a pas été fait, et c'est précisément ce dont j'ai à me plaindre et dont se sont plaints aussi un grand nombre d'électeurs des Côtes-du-Nord.

J'attends la réponse, non pas de M. le président du conseil, puisqu'il m'a fait prévenir qu'il était retenu au Sénat, mais de M. Bourgeois - pas de M. Bourgeois de la Vendée... (Hilarité), - mais de M. Bourgeois, sous-secrétaire d'Etat à l'intérieur, et j'espère, messieurs, que notre honorable collègue nous donnera satisfaction pour l'importante question que j'ai l'honneur de porter devant la Chambre. (Applaudissements à droite.)

M. le président. La parole est à M. le sous-secrétaire d'Etat à l'intérieur.

M. Léon Bourgeois, sous-secrétaire d'Etat à l'intérieur. Messieurs, je ne compte pas suivre l'honorable M. de Baudry d'Asson dans tous les développements qu'il a donnés à sa question. Il est, en effet, une partie de ces développements auxquels M. le président lui-même a fait réponse en rappelant à l'ordre notre honorable collègue... (Murmures et interruptions à droite.)

M. Jolibois. On n'a jamais entendu pareil langage!

M. le sous-secrétaire d'Etat à l'intérieur. Je crois, mes chers collègues, que lorsqu'un membre du gouvernement de la République a l'honneur de parler à cette tribune il a le droit de dire que, s'il ne répond pas aux attaques dirigées contre les institutions républicaines, c'est parce qu'il y a déjà été répondu par une voix plus autorisée que la sienne. (Applaudissements à gauche.)

M. Jolibois. Si vous aviez commencé en tenant ce langage, nous n'aurions pas réclamé!

M. le sous-secrétaire d'Etat. J'en reviens à l'une des deux questions posées par M. de Baudry d'Asson. En effet, il avait prévenu le Gouvernement qu'il l'interrogerait sur les élections municipales de Challans (Vendée), et il a, tout à l'heure, ajouté à cette question celle qui touche aux élections d'une commune des Côtes-du-Nord.

Je n'ai pas été prévenu de sa question en ce qui touche le département des Côtes-du-Nord, je n'ai donc pu prendre aucun renseignement et je demande la permission de n'y pas répondre. (Très bien! très bien! à gauche.)

M. de Baudry d'Asson. Parlez de la Vendée!

M. le sous-secrétaire d'Etat. J'y arrive.

En ce qui touche Challans, la question a déjà été traitée dans une autre assemblée. En effet, les amis de notre honorable collègue ont déjà posé - il le rappelait tout à l'heure -- au conseil général de la Vendée la question qui est aujourd'hui portée devant vous. Je crois qu'il ne suffira de faire connaître à la Chambre les termes dont s'est servi le préfet de la Vendée, l'honorable M. Edmond Robert, dont beaucoup d'entre vous se souviennent, car il a fait partie de la dernière Assemblée...

M. Bourgoois (Vendée). Il siégeait au centre gauche!

M. Clémenceau. C'est un très bon préfet de la République.

Un membre à droite. On lui a donné une compensation!

M. le sous-secrétaire d'Etat. Il me suffira, dis-je, de faire connaître les termes dont s'est servi M. le préfet de la Vendée pour qu'il soit démontré à la Chambre que les accusations dirigées contre lui, que les accusations de tentative d'étranglement du suffrage universel qui lui ont été adressées tout à l'heure sont tout au moins exagérées. Il est évident que cette exagération a échappé aux vivacités de l'improvisation de M. de Baudry d'Asson. (Rires à gauche.)

M. de Baudry d'Asson. Pas du tout ! elle était bien calculée. Je n'ai pas exagéré le moins du monde. J'ai au contraire atténué. (Nouveaux rires)

M. le sous-secrétaire d'Etat. Alors, je le regrette.

Voici comment s'est exprimé M. le préfet:

« Je pourrais répondre par une fin de non-recevoir, nous ne sommes ici ni conseil de préfecture, ni conseil d'Etat; mais je n'ai pas coutume de me dérober devant le conseil général. Autrefois le scrutin municipal ne durait que trois heures, au choix du préfet... »

M. Maynard de la Claye. Sous l'empire!

M. le sous-secrétaire d'Etat. ... «la loi de 1884, plus libérale, donne aux électeurs une plus grande latitude.

Vous savez, en effet, que la loi de 1884, une loi républicaine, a porté à six heures la durée du scrutin.

J'ai fixé à huit et à neuf heures l'ouverture des scrutins à Challans, et leur fermeture à six heures.

Le nombre des heures, vous le voyez, est supérieur de deux et trois heures au nombre légal fixé par la loi de 1881.

Les électeurs ont eu de longues heures pour voter. »

M. Maynard de la Claye. C'est toujours le matin qu'on vote!

M. le sous-secrétaire d'Etat. Le chiffre des votants a du reste été très élevé.

J'ajoute, si je m'en rapporte à ce que dit notre honorable collègue, que cette élection a même eu pour résultat la nomination d'un candidat favorable à l'opinion de M. de Baudry d'Asson: ce qui ne semble pas indiquer que les électeurs de cette opinion aient été gênés dans l'exercice de leur droit de suffrage.

J'ai usé d'un droit, dit le préfet, je ne peux pas prendre d'engagements formels : mais seulement promettre d'user de ce droit avec modération et conformément aux intérêts locaux. »

Eh bien, messieurs, je crois que le Gouvernement n'a aucun reproche à faire au préfet et que la Chambre estimera que la loi de 1884 ayant remis au préfet le droit de fixer lui-même l'heure de l'ouverture du scrutin, pourvu que, comme M. le préfet l'a indiqué et comme le Gouvernement le promet, très volontiers, mon cher collègue, ce droit soit exercé dans des conditions de modération suffisantes et d'appréciations équitables des intérêts locaux, toute satisfaction est donnée à la loi et aux exigences du suffrage universel. (Très bien ! très bien! à gauche.)

M. Maynard de la Claye. Pourquoi n'a-t-on pas fait comme d'habitude ?

M. le président. La parole est à M. de Baudry d'Asson.

M. de Baudry d'Asson. Messieurs, l'honorable sous-secrétaire d'Etat n'a pas cru devoir répondre à la première partie de ma question. Il prétend que j'ai été rappelé à l'ordre, et il ne se trompe pas en cela... (On rit).... mais je constate qu'il se contente d'une réponse bien facile. (Très bien! à droite.)

M. le président. M. de Baudry d'Asson veuillez ne pas vous engager sur ce terrain qui n'est pas celui de la question.

M. de Baudry d'Asson. Je ne m'en plains pas, un rappel à l'ordre de plus ou de moins, c'est peu de chose... (Nouveaux rires); surtout lorsqu'il m'est infligé par le président actuel, il ne m'est pas désagréable le moins du monde. (On rit.)

M. le président. Laissez-moi vous dire, monsieur de Baudry d'Asson, que si je vous ai rappelé à l'ordre, ce n'est pas pour vous être agréable. (Très bien très bien! à gauche.

M. de Baudry d'Asson. Cela ne me touche pas beaucoup.

M. le président. Je vous ai rappelé à l'ordre, pour me conformer au règlement.

M. de Baudry d'Asson. Je n'insiste pas.

Quant à la seconde partie de la réponse de M. le sous-secrétaire d'Etat, elle ne me donne pas satisfaction; il s'est borné à lire à la tribune ce que M. le préfet avait dit au conseil général, relativement au vœu dont je vous ai donné connaissance.

M. le préfet a dit simplement qu'il s'arrangerait de façon à prendre les intérêts de tous... (Interruptions à gauche.)

M. Maynard de la Claye. Et surtout des siens!

M. de Baudry d'Asson. ... mais qu'il ne promettait rien et qu'il ne voulait nullement s'engager à ouvrir le scrutin à une heure plus matinale.

M. le comte de Lanjuinais. M. le sous secrétaire d'Etat a promis la continuation de l'arbitraire!

M. Monis. Changez l'heure de la messe!

M. de Baudry d'Asson, Changez l'heure de la messe! dites-vous! Eh bien, puisque vous répondez que votre Gouvernement ne criera pas à l'ingérence du clergé, nous en profiterons, vous pouvez y compter. (Rires à droite.) Mais il serait préférable que le scrutin fût ouvert à sept heures.

Le Provost da Launay. Les électeurs n'ont pas le temps de rentrer chez eux entre les deux messes si on change l'heure de la messe. Voilà la vraie raison à invoquer.

M. de Baudry d'Asson. M. le préfet n'a pas dit qu'il ouvrirait le scrutin plus tôt. Je vous demande cependant, monsieur le sous-secrétaire d'Etat, quel est l'intérêt du préfet à retarder l'ouverture du scrutin, s'il a réellement le désir de donner toute liberté aux électeurs pour se rendre aux urnes? Quel est donc l'avantage que les électeurs peuvent retirer de l'ouverture du scrutin à une heure tardive? Répondez.

Nous allons avoir à Challans de nouvelles élections dans quelques jours, puisqu'il a plu au conseil de préfecture de la Vendée d'invalider le scrutin qui avait donné la majorité au candidat conservateur. M. le préfet tiendra-t-il compte du vœu exprimé par le conseil général ?

Le bruit court, au contraire, mais je ne puis y croire, que l'ouverture du scrutin serait encore retardée.

M. Maynard de la Claye. Il ne manquerait plus que cela !

M. Gustave Rivet. Le scrutin dure jusqu'à six heures du soir.

A gauche. L'ordre du jour !

M. de Baudry d'Asson. Je dis donc avec raison que M. le sous-secrétaire d'Etat n'a pas répondu à ma question, qu'elle reste entière et que nous ne sommes pas plus assurés en ce moment, de nous ne l'étions tout à l'heure, de l'ouverture du scrutin à une heure plus matinale...

M. Maynard de la Claye. La question ne peut rester ainsi!

M. de Baudry d'Asson. ... c'est-à-dire à une heure qui donne à tous les électeurs une égale liberté. (Applaudissements à droite.)

M. Bourgeois (Vendée). Je demande la parole.

M. Steenackers. Mais il s'agit d'une question.

M. le président. L'orateur a la parole, parce qu'il m'a annoncé l'intention de transformer la question en interpellation.

A gauche. A un mois! à un mois! (Bruit.)

Sur divers bancs à droite. Pariez! parlez!

M. le président. Messieurs, vous allez fixer tout à l'heure la date de l'interpellation.

M. de Baudry d'Asson. Si vous n'avez pas peur de la lumière, vous accepterez la transformation immédiate de la question en interpellation.

M. Bourgeois (Vendée). Messieurs, je ne veux dire qu'un mot, c'est dans un intérêt général, dans un intérêt d'ordre supérieur que je demande à transformer la question en interpellation.

Il ne s'agit ni de la Vendée ni de Challans, il s'agit de toute la France.

M. le président. Il s'agit de fixer la date de l'interpellation.

Sur divers bancs à gauche. A un mois! à un mois!

M. de Baudry d'Asson. L'élection à lieu dans huit jours, messieurs!

M. le président. La parole est à M. le sous-secrétaire d'Etat à l'intérieur.

M. le sous-secrétairs d'Etat à l'intérieur. Messieurs, le Gouvernement est toujours aux ordres de la Chambre pour la fixation de la date d'une interpellation; je crois cependant nécessaire de faire connaître qu'il lui sera impossible de donner à la Chambre une autre réponse que celle que j'ai apportée ici en son nom...

M. de Baudry d'Asson. Parce que vous n'avez pas de bonnes raisons à donner aujourd'hui : vous n'en aurez pas davantage dans un mois!

M. le sous-secrétaire d'Etat. Permettez!... M. de Baudry d'Asson nous a reproché de n'avoir pas répondu tout à l'heure exactement et nettement à sa question...

M. de Baudry d'Asson. C'est vrai!

M. le sous-secrétaire d'Etat. ... attendu que j'ai répondu ici que, comme le préfet l'avait promis, il serait usé avec modération...

M. Maynard de la Claye. On promet, mais on ne le fait jamais! Tous les opportunistes disent cela! M. le sous-secrétaire d'Etat. Voulez-vous me permettre ?...

J'ai répondu que, comme l'avait déclaré le préfet de la Vendée, il serait usé, avec modération, et en tenant compte des intérêts locaux, du droit que la loi donnait à l'administration.

M. do Lamarzelle. Il ne s'agit pas du droit des préfets : il s'agit de la justice!

M. le sous-secrétaire d'Etat. J'ajoute que le Gouvernement ne peut pas prescrire aux préfets de choisir telle ou telle heure pour l'ouverture du scrutin, en effet, s'il édictait cette prescription, il commettrait | lui-même une violation de la loi de 1884. (Très bien ! très bien ! à gauche.)

Sur plusieurs bancs à gauche. Aux voix ! aux voix!

M. le président. Je vais consulter la Chambre sur la fixation de la date de l'interpellation...

M. Bourgeois se présente à la tribune. | (Bruit à gauche.)

| A droite. Parlez! parlez! On a toujours le droit de répondre à un ministre!

M. le président. M. Bourgeois me dit qu'il demande la parole pour un rappel au règlement.

A gauche. C'est de l'obstruction.

M. le président. Veuillez faire silence, messieurs!

M. Bourgeois (Vendée). Si on ne m'interrompait pas, la question serait déjà vidée. J'y mets une grande modération, mais enfin je ne puis pas faire autrement que de demander la parole pour répondre aux objections qui viennent d'être faites à la tribune par M. le sous-secrétaire d'Etat. Un député a toujours le droit de répondre à un ministre, et je ne vois pas, dans l'espèce, ce qui distingue M. le sous-secrétaire d Etat d'un ministre. Très bien! à droite.)

Je tiens à faire une déclaration, qui est celle-ci : La question que j'ai l'intention de poser intéresse mes collègues de gauche comme mes collègues de droite. C'est une question de droit commun, c'est la liberté et la dignité des électeurs, c'est le suffrage universel lui-même que je défends. (Très bien! à droite.)

M. de Baudry d'Asson. Dites que l'élection a lieu dans quelques jours !

M. le président. Je réponds à M. Bourgeois que je ne pouvais pas lui donner la parole autrement que pour la fixation du jour.

La Chambre n'a été saisie que d'une question. La parole ne peut être donnée qu'à celui qui a posé la question et au Gouvernement qui lui répond.

M. Bourgeois (Vendée). Je demande la parole sur la fixation du jour de l'interpellation.

M. le président. L'orateur a la parole pour la fixation du jour de l'interpellation, (Bruit à gauche.)

M. Bourgeois (Vendée). Vous avouerez aiu moins, messieurs, que nous avons un grand fonds d'énergie et de ténacité pour défendre ici nos droits. (Très bien! à droite.)

M. Floquet, président du conseil, déclarait dernièrement à la Chambre que quand on renvoyait une interpellation à un mois, c'était en quelque sorte repousser cette interpellation et l'enterrer! (Oui ! oui! à gauche.)

Passons...

M. de Baudry-d'Asson. C'est absolument vrai. Le Journal officiel en fait foi.

M. le président. Quel jour demandez-vous, monsieur Bourgeois ?

M. Bourgeois (Vendée). Je demande que l'interpellation soit fixée le plus promptement possible, immédiatement ou à samedi. Le suffrage universel a le droit de ne pas attendre. (Très bien! très bien ! à droite.)

Plusieurs membres à gauche. A un mois !

M. le président. Je vais consulter la Chambre sur les deux dates proposées. M. Bourgeois demande samedi, d'autres membres proposent de renvoyer l'interpellation à un mois.

M. Paul de Jouvencel. Pardon, monsieur le président, mon interpellation devra, en tous cas, passer avant celle de M. Bourgeois.

M. le président. Monsieur de Jouyencel, votre interpellation est bien antérieure |à celle de M. Bourgeois.

M. Albert Duchesne. On pourrait peut-être les discuter toutes les deux le même jour.

M. le président. Je consulte la Chambre sur la date la plus éloignée, celle d'un mois.

(La Chambre, consultée, renvoie l'interpellation à un mois.)

M. de Baudry d'Asson. Voilà ceux qui se disent les amis de la liberté, les partisans de la lumière. (Exclamations à gauche.)

M. Bourgeois (Vendée). Tous renv. mon interpellation après l'élection de Paris.

QUESTIONS POSEES A M. LE MINISTRE

DE LA GUERRE

M. le président. M. Mérillon a la parole pour adresser une question à M. le ministre de la guerre, qui l'accepte.

M. Mérillon. Messieurs, je me reprocherais de faire perdre à la Chambre même cing minutes de son temps, si précieux en ce moment, si un intérêt sérieux ne m'amenait à poser en quelques mots une question à M. le ministre de la guerre.

M. le ministre de la guerre vient de décider que le siège de la future école de santé militaire serait placé à Lyon... (Très bien! très bien! sur divers bancs à gauche.)

M. Marmonier. C'est une excellente décision !

M. Piou. Toulouse aurait eu plus de droit que Bordeaux !

M. Paul de Cassagnac. Pourquoi ne l'aurait-on pas mise à Auch?

M. Lafont (Seine). Qu'on juge de ce produirait le scrutin d'arrondissement!

M. Morillon. Je n'ai nullement l'intention de discuter la décision de M. le ministre de la guerre, parce que je me rends parfaitement compte qu'en ne prenant pas elle-même la décision, la Chambre a entendu laisser le ministre juge du meilleur siège de cette école.

Mais mes collègues comprendront qu'il y a une trop grande partie du pays, une région trop importante intéressée à la question, pour qu'il ne soit pas absolument nécessaire que nous demandions à M. le ministre de la guerre quelles sont les raisons graves qui l'ont déterminé (interruptions et bruit), quelles sont les raisons graves qui l'ont déterminé.... (Bruit croissant.)

M. le président. Mais, messieurs, il est impossible que la Chambre continue à délibérer au milieu d'un pareil bruit. L'orateur exerce son droit, le ministre lui répondra; je vous prie de l'écouter en silence.

Sur plusieurs bancs. Aux voix! aux voix!

M. Lafont (Seine). Mais toujours les grandes villes réclament pour elles! Tantôt c'est Bordeaux, puis Lyon, puis Marseille !

M. Mérillon. Monsieur Lafont, quand on vous aura nommé président de la Chambre, vous vous mêlerez de diriger la discussion, pas avant. Vous n'avez pas le droit d'empêcher vos collègues de parler. Vous interrompez constamment, sans jamais monter à la tribune.

M. Salis. Mais moi aussi, je vais réclamer pour Montpellier!

M. le président. L'orateur attendra le silence avant de continuer son discours.

(Le silence se rétablit.)

M. Andrieux. C'est à Digne (Basses-Alpes) qu'il fallait placer l'école de santé militaire. (On rit.)

M. Mérillon. Je demande à M. le ministre quelles sont les raisons graves qui ont pu le déterminer à priver la ville de Bordeaux du bénéfice d'un décret antérieurement rendu en sa faveur.

Un membre à gauche. La ville de Rennes pourrait également réclamer!

M. le président. La parole est à M. le ministre de la guerre.

M. Reybert. Il aurait mieux valu ne pas créer d'école de santé.

M. de Freycinet, ministre de la guerre. Messieurs, l'honorable M. Mérillon demande au ministre de la guerre quelles sont les raisons qui ont pu le déterminer à choisir la ville de Lyon comme siège de la future école de santé militaire.

L'honorable M. Mérillon ne peut pas ignorer que ma situation particulière est déjà une réponse à la question. Il sait, en effet, que, par une foule de côtés, je me rattache a la ville de Bordeaux. En ce moment même c'est un de mes proches parents qui administre le département: c'est un de mes amis personnels qui est à la tête de la municipalité. Par conséquent, si j'avais suivi mes inclinations, c'est la ville de Bordeaux que j aurais choisie. (Très bien! très bien ! à gauche.)

M. Dugué de la Fauconnerie. La ville de Bordeaux serait mal fondée à se plaindre.

M. le ministro de la guerre. Mais ce ne sont pas mes préférences personnelles que j'ai dù consulter. Je me suis trouvé en présence d'un ensemble de faits devant lesquels, dans l'impartialité qui m'est commandée, j'ai du me prononcer en faveur de la ville de Lyon. J'ai fait procéder à une double enquête par le directeur du service de santé au ministère de la guerre, M. Dujardin-Beaumetz, dont le nom est connu dans cette Assemblée. Cette enquête a établi la prépondérance de la ville de Lyon au point de vue de ses ressources médicales et chirurgicales.

M. Salis. Les ressources médicales de Lyon sont nulles. (Rires.)

Divers membres à gauche. Il fallait aller à Montpellier alors! (Nouveaux rires.)

M. le ministre de la guerre. Non content de cette double enquête, j'ai soumis toute l'affaire au conseil technique de santé militaire, qui est composé, vous le savez, des hommes les plus compétents.

A la suite d'un rapport très approfondi dont je pourrais donner lecture, si je ne craignais de faire perdre ses instants à la Chambre, le comité technique de santé militaire, à l'unanimité de ses membres, et dans deux délibérations successives, n'a pas hésité à conclure que les ressources médicales et chirurgicales de la ville de Lyon l'emportaient sur celles de toutes les autres villes en présence. (Interruptions.)

Dès lors, quel était le devoir du ministre de la guerre dans une question où, ne pouvant évidemment consulter ses lumières propres, il est obligé de s'en rapporter à l'avis des spécialistes ? Il devait, vous en conviendrez, se ranger, sur une question de cet ordre, à l'avis du conseil supérieur technique de santé et à l'avis du service militaire de santé. (Très bien ! très bien !)

Je pense donc, messieurs, que vous devez considérer la question comme ayant été l'objet de l'enquête la plus approfondie et la plus impartiale. Vous reconnaîtrez, j'en suis convaincu, que, dans la décision qu'il a prise, le Gouvernement, sans s'arrêter à des questions d'intérêt particulier, ne s'est laissé guider que par des considérations d'ordre militaire. (Très bien! très bien !

Je prie donc les représentants des villes qui auraient pu légitimement prétendre à être le siège de l'école de santé, de vouloir bien s'incliner devant la décision d'un tribunal qui, je le répète, n'a considéré dans toute cette affaire que l'intérêt même de l'armée. (Nouvelles marques d'approbation.)

M. le président. La parole est à M. de La Ferronnays pour poser une question à M. le ministre de la guerre qui l'accepte.

M. le marquis de La Ferronnays. Messieurs, la question que j'ai l'honneur d'adresser à M. le ministre de la guerre, et que je le remercie d'avoir bien voulu accepter immédiatement, est de celles qui comportent leur réponse par elles-mêmes. Toutefois, comme les susceptibilités, les moins explicables parfois, du patriotisme sont toujours parfaitement respectables, je suis heureux de fournir a M. le ministre de la guerre l'occasion de calmer une petite émotion qui vient de se produire sur une de nos frontières.

Les régiments de cavalerie, qui sont en formation, sont très disputés par toutes les villes qui peuvent espérer en avoir un. Le 30° régiment de dragons vient d'être affecté à la ville de Lur3. Des amis maladroits - tout le monde en a - se sont appliqués à présenter cette décision de l'autorité militaire comme étant motivée exclusivement par des considérations politiques; et, dans cet ordre d'idées, à la date du 12 décembre dernier, la commission municipale de Lure a été jusqu'à écrire une lettre à l'un de nos collègues pour le remercier d'un résultat qu'elle prétendait n'être dû qu'à son activité et à ses démarches. (Rumeurs.) Cette lettre a causé dans la région du corps d'armée qu'elle concerne une profonde émotion. Il est évident que lorsqu'il s'agit d'une question aussi importante que l'emplacement d'un régiment de cavalerie, qui doit être sur sa base d'opérations même, puisque, dans certaines éventualités, il peut être appelé à partir en deux heures, - il est évident, dis-je, que le choix d'une garnison de cavalerie, partout et surtout dans l'Est, ne doit être réglé et déterminé que par des considérations purement stratégiques. Il ne viendra à l'esprit de personne, j'en suis sûr, que M. le ministre de la guerre, en affectant la ville de Lure à la formation du 30e régiment de dragons, n'ait obéi qu'à des motifs politiques.

Il a certainement dû être exclusivement guidé par des motifs stratégiques que nous n'avons pas à connaître et que nous n'avons pas à lui demander. Mais il est nécessaire que l'opinion publique, justement émue, et craignant que de nouveaux faits se produisent sous l'action des mêmes influences, peut-être au grand détriment de la sécurité du territoire, soit rassurée, et je viens demander à M. le ministre de la guerre de vouloir bien le faire. (Très bien ! très bien ! à droite.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la guerre.

M. de Freycinot, ministre de la guerre. Messieurs, l'honorable M. de La Ferronnays a bien voulu admettre par avance que ce sont uniquement des raisons d'ordre militaire qui ont pu déterminer le ministre dans le choix du siège des régiments de cavalerie qu'il a créés. Je l'en remercie, car il a eu parfaitement raison.

Il n'a jamais pu entrer dans l'esprit du ministre de la guerre de se laisser guider par une autre considération que celle-là, et, si le régiment dont il est question a été placé à Lure, c'est que la situation de Lure, par rapport à la frontière, désignait cette ville comme un des points où un des régiments de cavalerie devait être placé.

J'ajoute, d'autre part, que, pour fixer son choix, le Gouvernement fait toujours entrer en ligne de compte les sacrifices particuliers que s'imposent les diverses localités qui revendiquent chez elles l'installation d'un régiment.

A ce point de vue, je dois déclarer que la ville de Lure est entrée dans une voie qui était de nature à lui concilier l'intérêt du Gouvernement; telles sont, messieurs, les raisons qui ont provoqué la décision du ministre de la guerre. (Très bien! très bien!)

DÉPÔT DE RAPPORT

M. Arthur Leroy. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre, au nom de la commission du budget, un rapport sur le projet de loi concernant la création d'un service maritime postal entre la France et la côte occidentale de l'Afrique.

M. le président. Le rapport sera imprimé est distribué.

Convocation des électeurs 11 novembre 1888

A MESSIEURS LES ÉLECTEURS

DE LA COMMUNE DE CHALLANS

MESSIEURS LES ELECTEURS,

Vous êtes convoqués pour élire un Conseiller municipal dimanche prochain. J'ai l'honneur de solliciter vos suffrages. Si vous me croyez capable de vous représenter, votez pour moi.

Les intérêts de la ville sont aussi négligés que ceux de la campagne.

Les rues de Challans ont besoin d'un meilleur entretien.

L'éclairage de la ville est indispensable.

Il y a beaucoup à faire pour l'agriculture, en augmentant le rendement des blés par la culture d'espèces nouvelles et en soignant sérieusement nos vignes si nous voulons les conserver.

Electeurs, nos intérêts sont les mêmes. Comptez sur moi pour les défendre.

Challans, le 11 novembre 1888.

C. CANTIN.

Votants 1093 inscrits 1423
Cantin 536 Massoneau 549
douteux 5
blancs 6
divers 3

(Massoneau a été déclaré élu, mais l'élection a été annulée, sans doute parce que la majorité y est très faible, eus égard aux bulletins annulés)

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